samedi 6 avril 2013

Houellebecq, la possibilité d’un vers


Quand un homme a écrit des romans marquants, est devenu ce qu’on peut bien appeler une star internationale, a même reçu le sacro-saint prix Goncourt avant que celui-ci ne devienne une plaisanterie, et qu’il continue à écrire des poèmes, eh bien c’est signe que cet homme ne peut pas être mauvais. Le nouveau recueil de poèmes de Michel Houellebecq, Configuration du dernier rivage (si ça, c’est pas du typique…), paraîtra chez Flammarion le 19 avril. Ce qui touche chez Houellebecq, c’est qu’il reste toujours lui-même, qu’il perpétue son univers invariablement… houellebecquien ! Si d’aucuns jugèrent le style d’Extension du domaine de la lutte trop “plat”, pas écrit, décrétant même que le roman péchait d’une absence de style (diantre !), ses phrases ont toujours relevé d’une véritable poésie. Mais celle de Houellebecq est une poésie “à froid” – ni lyrique, ni oulipienne, ces deux poncifs de la poésie française. En une petite centaine de pages, l’écrivain revisite ici ses obsessions (le monde qui change, les postures pathétiques de chacun, un certain romantisme noir versus pop-song.) Des poèmes jamais hors ni au-dessus du contemporain, mais qui jouent constamment avec. Des textes comme des aphorismes, ou des micronouvelles, ou de futurs romans. Et des phrases qui s’articulent de façon inattendue, et claquent, et restent. La vie tourne autour d’une épiphanie perdue et de l’impossibilité d’en faire le deuil : “Et l’amour, où tout est facile/Où tout est donné dans l’instant/Il existe, au milieu du temps/ La possibilité d’une île“. Sauf que le temps n’est pas infini, et les chances de renouveler cette grâce sont minces. Tout cela dit avec un fatalisme que d’aucuns jugeront désespéré, alors que c’est seulement la marque d’une ultralucidité qui est celle des plus grands écrivains.

lesinrocks.com

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